En métropole, 1 agence bancaire sur 7 est francilienne. Toutefois, l’Ile-de-France est un territoire contrasté. Certains départements s’avèrent moins bien lotis, comme la Seine-Saint-Denis. Mais, même à Paris, le stock d’agences a largement fondu ces 10 dernières années.
Cet article entre dans le cadre d’un partenariat avec Moneyvox. Infostat-Marketing édite des données géolocalisées sur les banques et assurances.
A vue de banques, l’Ile-de-France est une tâche noire ! En jetant un rapide coup d’œil à la carte de France des agences bancaires réalisée en exclusivité par Infostat Marketing pour MoneyVox, il est en effet impossible de distinguer chaque point, symbolisant une agence, tant le maillage semble serré. Nous avons tout de même fait le calcul ! Sur les quelques 32 000 agences que compte la métropole (en excluant les agences postales qui proposent des services bancaires limités), plus de 4 800 sont implantées en Ile-de-France, soit 1 agence bancaire sur 7 qui est francilienne.
Une concurrence accrue en Ile-de-France
L’Ile-de-France se caractérise aussi par la diversité des enseignes présentes. Alors que dans les zones rurales, il est plus fréquent de voir le logo du Crédit Agricole et du Crédit Mutuel que celui de BNP Paribas et de la Société Générale, en Ile-de-France, toutes les banques ont pignon sur rue. Les calculs que nous avons rélisés le confirment. Additionnées, les agences BNP Paribas, Société Générale et LCL représentent 33% du stock d’Ile-de-France, contre 17% à l’échelle de la métropole. Cette présence accrue des banques nationales s’explique notamment par leur cible de clientèle, plus aisée et plus urbaine. C’est aussi le fruit de leur histoire et de l’héritage d’un réseau dense aux abords de la capitale. Pour l’anecdote, « dans BNP Paribas, il y a Paris ».
Plus généralement, les cartes des implantations semblent, plus précisément, témoigner d’une concentration particulièrement forte à Paris intramuros des agences des banques nationales, et aussi, mais un peu moins, des établissements mutualistes. « Pour comparer, il faut tenir compte du stock d’agences du groupe qui va avoir une incidence sur la stratégie des banques, souligne Laurent Terral, chargé de recherche à l’Université Gustave Eiffel. Avec 500 agences, une banque peut se permettre une implantation dans des territoires plus reculés, alors qu’avec une centaine de points commerciaux, comme c’est le cas pour le réseau Crédit du Nord, l’enseigne se concentre logiquement sur Paris afin de sécuriser le rendement de ses agences », détaille le chercheur co-auteur en 2010 de l’article Territoires bancaires et recompositions socio-économiques de la métropole.
Outre la proximité d’une clientèle aisée – en témoignent les dépôts bancaires moyens qui frôlent les 250 millions d’euros par agence à Paris, contre 71 millions d’euros en Essonne -, cette implantation importante s’explique aussi par la centralité économique de Paris et les flux de population qui en découlent. Selon l’Insee, dans une étude parue en février dernier, 59% des personnes travaillant à Paris n’habitent pas la capitale, ce qui représente la venue sur le sol parisien de 1,07 million de travailleurs. « Les clients des banques sont, certes, la plupart du temps rattachés à une agence en fonction de leur habitation mais ils peuvent aussi être affectés en fonction de l’endroit où ils travaillent », souligne Marin Delattre, expert banque de détail au sein du cabinet Sia Partners. Même si l’épidémie de coronavirus a comprimé les déplacements, « à Paris, il faut aussi tenir compte de la manne de touristes, qui ne vont certes pas ouvrir de compte mais vont se servir des agences pour retirer de l’argent ou faire du change », complète Laurent Terral.
Paris touchée fortement par les fermetures
Ceci dit, l’Ile-de-France et Paris ne sont pas épargnées par les fermetures d’agences. L’Ile-de-France concentre, certes, 15% des guichets mais aussi 19% de la population de métropole. Avec 233 agences bancaires en moins, Paris a vu son stock fondre d’environ 15% entre 2010 et 2020, soit plus que la moyenne nationale estimée à 9% (1). Ce niveau de restructuration fait de Paris le département où sur les 10 dernières années le nombre d’agences a le plus baissé. Résultat, les Parisiens doivent se répartir dans un nombre restreint d’agences. En termes de vitrines bancaires, avec 1 agence pour 1 773 habitants, contre 1 533 en 2006, ce ratio habitant par agence s’est dégradé de 16% dans la capital en moins de 15 ans.
Dans un contexte de recherche d’économies dans la banque de détail, cette dégringolade peut s’expliquer par la facilité à fermer des points de distribution à Paris par rapport à des communes initialement moins bien dotées en agences. Dans les villes, il est plus facile de trouver une agence du même groupe dans le quartier ou l’arrondissement d’à côté. L’attrition y est donc plus faible qu’en ruralité où la fermeture d’une agence peut amener ses anciens clients à être réaffectés dans une agence située à plusieurs kilomètres, comme l’a observé Renaud Combaud, maire du village d’Aigre qui a perdu sa dernière Caisse d’Epargne à l’automne 2020. « La Caisse d’Epargne la plus proche se situe à 25 kilomètres. Avertis par courrier de la fermeture de leur agence, la plupart des clients ont indiqué qu’ils allaient devoir changer pour le Crédit Agricole ou pour La Banque Postale, plus proches », explique le maire de cette commune du Sud-Ouest à notre partenaire Moneyvox. « Lorsqu’un réseau ferme une agence, c’est, dans une très grande majorité des cas, parce qu’il y a une autre à une distance raisonnable, voire très proche », nuance la Fédération bancaire française.
En outre, la nature même des clients citadins, en proportion plus jeunes et plus utilisateurs des outils de banque à distance, plaide en faveur d’un besoin moindre de se rendre en agence régulièrement. D’ailleurs, soulignons que les banques en ligne attirent proportionnellement une clientèle plus citadine. Ainsi, l’année dernière, Boursorama, leader de la banque en ligne, rapportait que 1 Parisien sur 11 était client, bien que la tendance soit à la décentralisation, insiste cette filiale de la Société Générale.
La Seine-Saint-Denis, le départment le moins bancarisé de France
Avec un ratio inférieur à 1 800 habitants par agence, Paris reste toutefois mieux lotie que la moyenne française, qui se situe autour de 2 000 habitants par guichet, d’après des statistiques de la BCE reprises dans l’Observatoire du financement des entreprises de mars 2021. Par rapport à la population, le maillage parisien reste également bien plus dense que dans le reste de l’Ile-de-France. D’autres départements, certes proportionnellement moins touchés par les fermetures récentes, demeurent moins bien bancarisés.
Concrètement, avec à fin 2020, 2 524 habitants pour une agence dans l’Essonne (contre 2 300 en 2006 selon l’article de recherche précédemment cité), 2 847 personnes pour une agence dans le Val-de-Marne (2 500 en 2006) ou encore 2 809 habitants par agence dans le Val-d’Oise (2 560 en 2006), la situation y est donc pire qu’à Paris. Le décalage est encore plus évident en Seine-Saint-Denis où nous comptons 1 agence pour 3 807 habitants, contre près 3 200 il y a une quinzaine d’années. Un indicateur en dégradation donc de 20% sur 14 ans en Seine-Saint-Denis, contre seulement -10% dans le Val d’Oise et -13% en Seine-et-Marne et le Val-de-Marne. Pour rappel, Paris est à -16%.
« Evidemment il faut invoquer des éléments explicatifs liés à la socio-économie de ce territoire », explique Laurent Terral. D’après le comparateur de territoire de l’Insee, qui reprend des données de 2017, le taux de chômage des 15-64 ans en Seine-Saint-Denis dépasse 18%, contre 11,9% à Paris et 13,9% au niveau de la France. Ce territoire étant moins riche (73 millions d’euros de dépôts bancaires par agence en Seine-Saint-Denis, contre près 410 millions à Paris), « les banques ne se battent pas pour y aller, c’est évident », commente le géographe questionné par notre partenaire MoneyVox.
Soulignons toutefois que l’indicateur de bancarisation choisi, le nombre d’habitants total rapporté au nombre d’agences, prend de fait en compte toute la population du territoire y compris les enfants n’ayant pas de compte en banque. Sur ce point, cet indicateur tend donc à surestimer le manque d’agences bancaires dans les départements ayant une population jeune par rapport aux départements comportant davantage de personnes en âge d’avoir un compte. C’est le cas en Seine-Saint-Denis où les moins de 14 ans représentent 22,6% de la population, alors que cette tranche d’âge représente seulement 18% de la population métropolitaine.
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